vendredi 15 février 2013

I miss you, Caroline...


Je ne vous ai pas oublié, mes amis… Juste une dose massive de projets au boulot ces derniers temps – pour de bonnes causes – et un autre projet des plus intéressants pour aider un ami, dont j’espère pouvoir un jour vous en dire plus.

Je lisais ce soir le post d’un ami musicien concernant la difficulté de faire son « nid » dans le monde musical sans être vu comme une bête de foire, et ce, plus spécifiquement, en Belgique.
Ne nous leurrons pas, l’industrie du disque va mal : s’il est difficile pour les artistes, parfois mêmes des plus connus, de se maintenir, que dire des jeunes artistes débutants ? Que dire également des décisions de maisons de disque qui utilisent un nombre impressionnant de billets verts pour des campagnes marketing d’artistes tels que Rihanna, Lady Gaga et autres ? Ne serait-il pas plus judicieux de faire usage de cet argent pour faire découvrir au monde de jeunes artistes inconnus et néanmoins talentueux plutôt que de l’utiliser pour faire la promo d’artistes pour lesquels le bouche à oreille des fans fonctionne mieux que n’importe quel autre moyen de communication existant ? J’ai au cours des derniers mois découverts un nombre impressionnant de groupes ou artistes qui m’ont fait vibrer et c’est toujours à la fois un déchirement et une colère intenses de les voir galérer autant… Bien sûr, des sites tels que YouTube, Soundcloud, MySpace et autres leur sont souvent d’une grande aide pour se faire remarquer mais cela ne suffit parfois pas. A mon humble niveau, j’aime partager ces petits moments de bonheur musical sur mon mur Facebook en me disant que si l’un de mes amis est séduit, c’est toujours cela de gagné.
Je ne travaille pas dans une maison de disque : il m’est donc fort facile – et fort indélicat, je le reconnais - de critiquer leur fonctionnement et leur gestion financière. Ce n’est pour autant que je n’ai pas le droit d’exprimer mon point de vue… en laissant l’occasion à l’un ou l’autre représentant de l’une de ces maisons dont les yeux « tomberaient » sur cet article de pouvoir me donner son point de vue.

Cela me rappelle d’ailleurs un autre épisode de vie « coup de gueule-esque » qui, encore aujourd’hui, me peine à chaque fois que j’y songe.

Fin 2009, j’apprenais que mon fournisseur de disques attitré allait mettre la clé sous le paillasson. Une fois la nouvelle avalée, on pense à plein de choses : au fait que ça va être l’enfer de trouver la perle rare, aux habitudes à perdre mais aussi… à ces personnes derrière le comptoir qui, les années passant, ne sont plus des inconnus mais des… des « potes ». Et là… aaah la vache, on a la rage ! Et on commence à cogiter… J’ai pas assez d’argent pour racheter le magasin, j’ai pas d’appuis politiques, la pétition ce n’est pas assez puissant… raaaaaahh ! Bon… m’en vais lui exprimer mon point de vue, à ce patron ! Ca ne sauvera certainement pas le magasin mais il aura au moins le point de vue d’une cliente…
Et c’est donc ainsi que naquit… ceci.


« Très cher monsieur,
Il n'y a pas trente-six façons de faire passer un message : la façon directe reste encore selon moi la plus efficace. Alors allons-y : "Mais nom d'un petit bonhomme, qu'avez-vous dans le crâne?". Il y a quelques mois d'ici, j'entendais dire que Caroline Music allait déménager après de longues années Rue de l’Université. Soit. Cette semaine, j'apprends que Francis fait sa dernière semaine et que Boulle n'en a normalement plus pour longtemps avant de quitter ce comptoir qui a vu défiler plus d'albums qu'on ne pourrait en mettre dans une pièce.
Sachez monsieur que je suis cliente depuis presque vingt ans (une bagatelle comparé à d'autres clients!) et que j'estime donc avoir le droit de vous exprimer ce mélange de déception, de mécontentement, voire de dégout profond.
Au cours des années, j'ai toujours pu compter sur mes trois larrons (Je n'oublie pas Gaétan, visiblement déjà évincé...) pour me dénicher des joyaux musicaux et la perle rare que ni Madame Fnac, ni Monsieur Mediamarkt ne daignent chercher. Vers qui vais-je pouvoir me tourner à présent? Les sites internet? Merveilleux mais cela ne remplacera en rien ces trois personnes que vous considérez comme de "simples" employés. A mes yeux, ils étaient (et sont encore!) bien plus que cela : ils sont devenus des amis que je respecte énormément et avec lesquels j'ai passé de bons moments accoudée à ce comptoir.

C'est donc finalement un double désastre : une institution musicale liégeoise incontournable des amoureux de la musique va fermer ses portes et des employés compétents et agréables sont "mis dehors". Qui en est la cause? Ah oui... vous.

Je serai sans doute la seule à prendre la plume pour exprimer mes sentiments mais très honnêtement, je crois ne pas être la seule à penser ceci. J'ai après tout entendu et vu par plusieurs fois au cours des dernières semaines les réactions des gens à l'annonce de la nouvelle, finalement fort proches de ce qui est exprimé dans les lignes précédentes.

AC/DC disait dans une de ses chansons "For Those About To Rock, We Salute You". Visiblement, le rock et toute autre forme de musique faisant le charme de Caroline Music vous importe peu. Sachez donc, Monsieur, que pour cette raison et bien d'autres encore, je ne vous salue pas et vous respecte encore moins. »



La partie la plus amusante maintenant : le jour où je suis passée déposer la lettre, j’étais, comme d’habitude et tel que décrit dans la lettre, accrochée au comptoir lorsque le destinataire de la missive a fait son apparition dans le magasin. Il l’a ouverte, demandant avec humour s’il s’agissait d’une admiratrice avant de commencer sa lecture et de se diriger vers le fond du magasin… Cinq minutes plus tard, il est revenu et ses premières paroles ont été de demander à ses futurs ex-employés « Mais c’est qui cette Nathalie ? ». Et eux de leur répondre : « Ooh une cliente fidèle… des années qu’elle vient ici ». Il finira par tourner en rond derrière le comptoir avec ma lettre en main et je ne sais toujours pas s’il était furieux, impressionné ou inquiet…

Vous allez me dire : « ouais, mais c’est pas très courageux de ne pas lui dire en face alors que t’étais là ! ».
Certes… mais ce n’est pas faute de l’avoir proposé à mes complices derrière le comptoir qui ont jugé plus drôle de laisser gamberger le type. Ce qui était, avec le recul, effectivement assez amusant.
Ce n’est pas non plus comme si je n’étais pas quasiment en train de manger le comptoir en lui lançant un regard noir… qu’il n’a même pas remarqué. (Oui, je suis très mauvaise pour dissimuler certaines de mes émotions :D )
Et puis aussi… c’est quand même pas comme si je ne lui avais pas laissé une adresse à l’arrière de l’enveloppe si l’envie lui prenait de me donner son point de vue. Chose qu’il n’a jamais faite…

Le 21 mai 2010, Caro Music fermait ses portes en beauté et comme elle nous a toujours fait vibrer : en musique, sur une scène improvisée où des artistes qui l’aimaient étaient venus la saluer une dernière fois. Ce soir-là, j’ai croisé de vieilles connaissances, parfois aussi des personnes que je n’aurais jamais soupçonnées fréquenter l’établissement… Beaucoup d’entre nous ont eu le cœur gros en réalisant qu’on ne descendrait plus cet escalier aux marches étroites et qui craquaient toujours un peu sous notre poids. Qu’on en mettrait plus les pieds dans le « ptit bureau du dessus » pour passer commande de la rareté qui nous faisait envie et qu’ils te dénichaient parfois en… Malaisie ! 

L’industrie du disque va mal mais à partir du moment où le public ne trouve quasiment plus dans les rayons que des « gros » artistes et qu’il est de plus en plus difficile d’obtenir le premier album d’un ptit groupe sympa pas trop connu dans un magasin faisant partie d’une grande « chaîne » (qui a pieds et poings liés par des contrats avec des… « grosses » maisons de disque ?), comment échapper à ce triste destin ? Parce qu’il serait VRAIMENT temps d’arrêter de prendre les gens pour des c** aussi…
Caroline, elle a toujours pris les gens comme ils étaient : qu’ils soient fans de Britney, des Beatles, du Crüe ou de Charles Aznavour, elle s’en fichait tant que vous étiez heureux… Pardon... elle « prenait » toujours les gens comme ils étaient.

Bref… Nous sommes en février 2013 et… bon sang… t’as pas idée mais… I miss you, Caroline…