Au détour
d’un post innocent sur Facebook afin de répondre à une question musicale m’étant
adressée, deux autres intervenantes ont joint la conversation et ont fini par
faire virer le post en version parallèle de la Bagarre dans la Discothèque de l’émission Entrez sans Frapper (La Première). Précisons par ailleurs que nous
sommes toutes les trois des participantes régulières de ce jeu musical qui
active tes neurones et élargit tes connaissances musicales.
Miss
K propose donc une question « Quelle est la plus belle chanson d’INXS qui
pourrait être proposée à Jérôme Colin (nda : chef d’orchestranimateur d’ESF) pour une
prochaine émission ? ». Miss C surenchérit en demandant d’argumenter ce
choix.
Ma
réponse ? « The
Stairs. Point barre. Et j'ai l'argumentation sans souci. Parce que je
l'aime cette chanson. […] (Et c'est vrai qu'on ne passe jamais assez d'INXS sur
La Première, j'dis pas ça pour influencer, hein... J'pose juste ça là...) ».
Ma
réponse est-elle subjective ? Absolument.
Est-elle
dès lors non recevable ? Ah, nenni. Pas si j'explique pourquoi elle est si belle…
Quelle
est la particularité de la chanson en général par rapport à d’autres
formes d’art ? L’association entre une mélodie ET des paroles.
Quelle
est la particularité d’une chanson-bonheur ? La combinaison entre LA
mélodie et LES paroles par-fai-tes. Et un frisson.
Bon allez :
la chanson !
Tenez,
la mélodie de The Stairs, par exemple.
Une crescendo, une belle comme je les aime. On démarre la chanson au synthé.
Calme, soft. Arrive doucement, en arrière-fond mais bien là, une touche de
guitare. Doucement, pas besoin de se presser. Ensuite, un peu de batterie mais
on continue dans la douceur. Un soupçon de percussions que la basse rejoint.
Voilà… Nous sommes à la 30e seconde et tous nos instruments ont fait
leur apparition. Pendant 30 nouvelles secondes, ils s’apprivoisent, apprennent
à se connaitre. Et puis, la guitare décide de prendre un peu d’autonomie… Premier
frisson.
Une
minute dix-neuf, une seule et unique note de basse dit à la batterie d’enchaîner, emportant un brin la rythmique de la chanson vers quelque chose de plus
énergique. Deuxième frisson. Déjà là, je sais que je ne vais pas y échapper…
Une
minute quarante. C’est le temps qu’il faut attendre avant d’entendre la voix de
Michael Hutchence. Un temps de dingue que je ne vois pourtant pas passer
tellement je suis envoûtée par la mélodie. La voix étant un instrument à elle
seule, celle d’Hutchence semble elle aussi guider les instruments vers de
nouvelles étapes de la chanson, tantôt avec douceur, tantôt avec un peu plus de
puissance… Avec, aussi, le lot de frissons que sa voix de velours a toujours eu
sur moi.
Cette
chanson, rien qu’à sa mélodie, donne l’impression que chaque instrument a
une vie propre, une chose à dire. Qu’ils sont tendresse mais rage aussi.
Presqu’au
bout de trois minutes, Hutchence leur rend leur liberté pour les laisser à
nouveau s’exprimer : batterie, basse, guitare, percussions… Chacun veut
nous dire une dernière chose avant que la chanson ne s’éteigne. Hutchence les
rejoint une dernière fois pour le refrain avant que tout ce beau monde ne
ferme boutique alors que toi, tu voudrais que ce morceau dure jusqu’à plus
soif.
Et
les paroles alors ? Aaah les mots ! Difficile d’expliquer la beauté
de mots avec d’autres mots mais… essayons. Commençons par préciser que Michael
Hutchence considérait ce titre comme sa chanson la plus ambitieuse et qu’elle
est apparemment la préférée d’Elton John issue du catalogue du groupe.
The Stairs (Les Escaliers) parle des hommes et
de leurs vies, de leurs peurs, de leurs passions, de choix à faire… mais en
incluant le tout dans un paysage urbain. Paysage où quels que soient la rue, le
bâtiment ou l’étage, nous continuons
à passer les uns à côté des autres sans nous voir alors qu’en fait, nous
partageons tous le même espace, nous avons tous des mouvements – des histoires
- identiques. Le message est sous-jacent mais bien là : on est tous ici,
ensemble sur la même planète ; posons-nous deux secondes et prenons le
temps de réfléchir à ce que nous sommes, ce que nous voulons et… à voir les
autres autour de nous. À voir que nous ne sommes pas seuls. Et à un peu plus
communiquer entre nous, pour tout dire.
Voilà
toute la beauté des mots de cette chanson : elle te laisse voir ce que tu
veux et tu ne peux pas t’empêcher de t’interroger, voire de la lire avec des
niveaux différents, comme ces étages qui défilent dans l’ascenseur. Loin d’être
moralisateur, Michael Hutchence te dit ce que lui voit. À toi de choisir ton
chemin…
The Stairs a presque trente ans d’existence. Aujourd’hui,
au moment où bon nombre de gens sur notre planète sont confinés dans des
buildings, où l’on doit se tenir à distance les uns des autres, ces paroles
prennent assurément encore un tout autre sens. Comme une petite claque. Comme
une piqûre de rappel de notre humanité qui perd parfois ce côté humain… Un
comble quand on lutte contre un méchant virus qui vole des vies par milliers.
Au-delà
de la mélodie et des paroles, il y a aussi les hommes qui se cachent derrière The Stairs, à savoir INXS, six Australiens.
Composé et écrit par Andrew Farriss et Michael Hutchence, le tandem créatif du
groupe, le titre est inclus sur X,
leur septième album, mais n’est malgré tout jamais sorti en single à grande
échelle.
Six mecs qui ont fait les beaux jours des années 80 et du début des
années 90.
Six types qui ont, en 1990, rempli le célèbre stade de Wembley.
Quatre soirs d’affilée. Encore aujourd’hui, certains artistes ne peuvent pas se
vanter d’en avoir fait autant. Et ne pourront probablement jamais le faire.
Si
l’écoute des albums fait du bien, cela reste en live – comme souvent ! - que le groupe démontre toute ses
harmonie et talent. Encore aujourd’hui, après dieu sait combien de concerts,
c’est celui d’INXS qui reste le plus fort. Parce que c’était mon premier ?
Probablement. Mais aussi parce que voir ces six-là avoir autant de plaisir à
être ensemble sur scène et avec nous, ça ne s’oublie jamais.
Par
chance, The Stairs a été capturée en
images en 1991, lors d’un autre concert à Wembley, encore plus vibrante que la
version album. On notera à la 02:53 ce magnifique "je chope un nouveau stick,
j'envoie l'autre valser et vous avez rien vu, hein ?" par
l'excellentissime Jon Farris. Image particulièrement bien attrapée par David
Mallet, réalisateur du concert. La fan de batterie en moi a fait son trip rien
qu’avec ces deux secondes-là. :D
The Stairs… Cette chanson, tu peux me la passer
25 ou 50 fois, ce seront 25 ou 50 fois où je vais
avoir les poils des bras et de la nuque qui se dressent d’un frisson, comme une
décharge électrique sans douleur, comme une impression de bonheurs dont on veut
encore... Parfois, tu sais pourquoi, tu sais l’expliquer et mettre des mots
dessus (comme je le fais ici) mais pas toujours… C’est juste un frisson.
Si toi
aussi, tu as déjà ressenti ce gros méchant frisson, alors je pense que tu as
trouvé ta ou tes chansons-bonheur. Parce que ton corps, lui, t’aura
physiquement fait ressentir cette combinaison d’une mélodie et de paroles…
parfaites.
Hier,
alors que j’écrivais cet article, Miss K. et Miss C. ont animé mon mur Facebook
pendant la soirée. À coups de GIFs déments, de références cinéma, de vannes
bien placées et de quelques musiques de bon cru. Résultat : j’ai oscillé
entre écriture sérieuse et gros fous rires. On peut donc dire que les délires
de Miss K. et Miss C. auront apporté plus de soleil hier soir que ceux qui
semblent un tantinet développer des attitudes anxiogènes face à un confinement
un peu compliqué. (Je juge pas, chacun vit son confinement comme il peut – ou
comme il veut ? - après tout !)
Morale
de l’histoire : je maintiens qu’on entend jamais assez d’INXS sur les
ondes radios pour frissonner de bonheur et qu’il ne faut jamais sous-estimer la
puissance du tandem K. C. &… the Sunshine Band pour égayer un
confinement!